Portraits d’aujourd’hui – de A à J
ISIDORE ALAZARD (1807-1854)
Article paru in extenso dans le Bulletin L’AMI DE PEZENAS 112-2025-03 P18-19 par Alain Sirventon
Sur les trois noms proposés par les Amis de Pézenas à la demande du conseil de surveillance du Centre hospitalier de Pézenas,celui de Isidore Alazard fut retenu pour l’EHPAD de notre ville.
Nous connaissons peu de choses de sa vie. Isidore Alazard est né à Pézenas en 1807, de Jean Etienne Alazard, médecin, et de Jeanne Thérèse Rosalie Prax dont la famille possédait l’hôtel du Tapis Vert situé place du marché des Trois-Six, dans lequel le papePie VII coucha le 4 février 1814, à son retour de Fontainebleau où il avait été retenu prisonnier ; ilépousera à Adissan en 1844, Noémie Rosalie Bernard. Il sera médecin de « l’Hospice de la Charité de Pézenas », notre actuel Centre hospitalier, transféré en ces lieux, l’ancien couvent des Ursulines, en 1793. Dès 1189, une Maladrerie existait déjà dans notre ville, complétée par un Hôpital des Pauvres en 1516, le tout réuni en 1666 dans un Hôpital Saint-Jacques situé alors dans l’actuelle rue Denfert-Rochereau.
Au temps de Isidore Alazard, « l’Hospice de la Charité de Pézenas » était tenu par la communauté des Filles de la Charité, plus connues sous la dénomination « Soeurs de Saint-Vincent-de-Paul », qui se dévoueront dans cet hôpital jusqu’en 1955, date de leur départ de Pézenas.
L’Établissement, communément dénommé « l’Hôpital», comptait au début du XXe siècle, un hospice, un service de médecine et de chirurgie, une maternité et un important orphelinat faisant office de précurseur en la matière. En effet, une maison de vacances pour les orphelins, justement appelée Saint-Vincent, avait été créée au Grau-d’Agde, en bord de mer et était en grande partie approvisionnée, Vainsi que l’orphelinat, avec les produits de son propre jardin potager.
Cet hôpital a joué un grand rôle dans la vie piscénoise, en raison notamment de sa situation en ville et de la proximité de son personnel avec les patients, les pensionnaires que l’on rencontrait tous les jours enville et les piscénois qui venaienty chercher assistance et secours, surtout les plus pauvres.
Nous savons par un autre médecin piscénois, le docteur Achille Bastard (1825-1884), père du docteur François Bastard, bienfaiteur de la ville, contemporain de Isidore Alazard, que ce dernier s‘est beaucoup dévoué pendant la terrible épidémie de suette miliaire qui a touché notre département en 1851 et fit de nombreuses victimes à Pézenas et dans les villages environnants.
Dans son ouvrage paru en 1867 intitulé Étude sur le traitement de la suette miliaire, le docteur Achille Bastard dira de son confrère, je le cite :
« Le docteur Alazard, le plus répandu de Pézenas, le plus estimé, personne ne nous contredira, un de ces hommes rares, l’honneur du corps auquel il appartient et dont nous avons pu apprécier nonseulement l’amitié et le savoir, mais encore le dévouement pour tous, est pour nous une autorité ».
Isidore Alazard exercera la médecine durant une vingtaine d’années et décèdera jeune, en 1854, à l’âge de 47 ans, vraisemblablement d’une suette sporadique, maladie qu’il avait courageusement combattue durant sa courte vie.
Sur son tombeau, dans le cimetière vieux de notre ville (carré B – dernière rangée), on peut toujours lire l’épitaphe suivante : « Il fut généreux envers les pauvres. Il emporta tous les regrets ».
Alain Sirventon
CLAUDE ALBERGE (1935-2013)
Né en janvier 1935, Claude Alberge aurait eu 90 ans cette année ; nous aurions tellement souhaité que sa personnalité continue à infuser sa chère ville de Pézenas.
Il est évident que notre revue avec un article sur les personnalités nouvellement mises à l’honneur par les noms attribués à des places ou des rues, se devait d’évoquer Claude Alberge, lui qui a tant donné avec son fameux livre Histoire de Pézenas par les rues et les places, une référence pour tous les piscénois. Né à Pézenas, ayant vécu toute sa jeunesse dans cette ville, imprégné de l’histoire de sa ville, de ses traditions, de ses bâtiments, il fait ses études au lycée de Pézenas, actuellement la mairie et ses services, puis à l’université de Montpellier ; il se retrouve professeur d’histoire-géographie au lycée de Carcassonne pour son premier poste avant de partir comme appelé en Algérie jusqu’en 1962. Au retour il est nommé enseignant au lycée de Pézenas et trouve le bonheur auprès de Christiane en 1965, Christiane qui a cheminé toutes ces années à ses côtés en l’encourageant sans cesse. Il devient proviseurpour la fin de sa carrière, particulièrement au lycée hôtelier de Carcassonne où il retrouve un de ses violons d’Ingres : la pâtisserie. Car il ne faut pas oublier ses incursions dès la classe de seconde dans le domaine de la pâtisserie auprès de Jo Cabrol, où il est devenu le chantre des petits pâtés et des choux à la crème. Ceux qui ont eu la chance de les goûter s’en souviennent avec émotion. Par son attachement à l’éducation populaire, à la laïcité, il a transmis à des générations d’élèves, d’étudiants, d’adultes venus écouter ses conférences à la station Mir, d’élus, son amour de l’histoire. Personne ne pouvait être indifférent à sa persuasion d’agir pour l’animation de la ville, pour le patrimoine de Pézenas. Au service de la culture il n’était jamais à court d’idées : conférences d’histoire de l’art, restauration de l’église de Conas,de la chapelle Saint-Roch, sorties au théâtre, après-midi littéraires, bibliothèque dans le local des Amis de Pézenas, création de Pézenas Enchantée, de la Mirondela dels Arts, formation des guides du Syndicat d’Initiative, n’oublions pas la Très Noble et
Très Gourmande Confrérie des Petits Pâtés dont la recette est inscrite à l’INPI grâce à sa ténacité…, la liste est longue ! Il est devenu par deux fois le président des Amis de
Pézenas, association créée en 1921 par Albert-Paul Alliès, association qu’il a servie avec passion et dévouement de nombreuses années en ayant un regard aigu sur la préservation du patrimoine et alertant sans cesse sur les dégradations et les
restaurations à venir.
Mais son coup de maître ce fut de faire revenir le fameux fauteuil de Molière de la boutique du Barbier Gély malgré les doutes de la DRAC. Installé depuis 2009 dans les salles qui lui sont consacrées au musée de Vulliod-Saint-Germain, musée créé en
1942 par le legs de la famille de Vulliod, l’histoire
de Pézenas s’enorgueillit des longs séjours de Molière grâce au soutien du prince de Conti,gouverneur du Languedoc. Claude Alberge s’est distingué aussi par ses écrits nombreux sur l’histoire de cette ville et du Languedocqui dévoilent des facettes inattendues, histoire, légendes, âme de ses habitants. Son travail d’écrivainest une référence pour tous ceux qui veulents’imprégner de cet air propre à Pézenas, de la vied’autrefois, du patrimoine, du passage de l’histoire.
Claude Alberge ne passait jamais inaperçu avec sastature imposante, sa voix puissante ; ses aviséclairés et tranchés ont touché tous ceux qui l’ont côtoyé.
Son action fut prépondérante dans le rayonnementde Pézenas à l’extérieur, donnant une nouvelle
vitalité à l’héritage piscénois afin de transmettre aux générations futures un patrimoine préservé et valorisé.
Il était juste qu’un hommage lui soit rendu, qu’une place de la ville porte son nom, lui qui a tellement parcouru, tellement regardé, tellement aimé cette ville.
Marie-France Dessenoix
JOSEPH ALRANQ (1919-2017)
De très nombreuses personnes se sont déplacées le vendredi 15 novembre 2024 à 11 h à l’entrée du Lotissement La Perrière, pour rendre hommage à Joseph Alranq, en présence du maire de PézenasArmand Rivière, de la famille Alranq, des membres du conseil municipal qui ont approuvé à l’unanimité la proposition de nommer cette rue « Joseph- Alranq ».
Le maire a expliqué : « Si nous sommes là aujourd’hui, c’est pour rendre hommage à Joseph Alranq dit « Jesse », résistant piscénois, le jour de son anniversaire – il aurait eu 105 ans – et à l’occasion des 80 ans de la Libération de Pézenas, c’est pour marquer notre respect pour une vie d’engagement et pour son rôle dans la Résistance piscénoise face à la collaboration pétainiste et à l’Allemagne nazie. C’est aussi transmettre notre Histoire et ses valeurs ainsi qu’honorer celles et ceux qui ont fait le choix de l’ombre pour que nous demeurions la patrie des lumières. Nous leur devons la Libération de la France et notre liberté ».
Lors de cette période tragique de notre histoire, aux côtés de Joseph Alranq, se trouvaient Louis Vacassy, Auguste Courren, Marius Flores, René Combes, Félix Fabre, Joseph Garris, André Loubières, tous coéquipiers de « Jesse » au sein du Stade Piscénois.
En effet, Joseph Alranq, né le 15 novembre 1919 et décédé à Pézenas le 11 mai 2017 à l’âge de 98 ans, fut l’un des plus grands joueurs de rugby de Pézenas ; avec lui disparaissait le dernier représentant de cette légendaire équipe du Stade Piscénois qui disputa dans les années trente le championnat de France de 1ère division Excellence pendant 15 saisons consécutives.
Il débuta en équipe première du club à l’âge de 18 ans, au poste de trois-quarts centre, lors d’un match de Championnat disputé le 17 octobre 1937 contre l’AS Béziers à Sauclières.
En raison de sa vitesse de course exceptionnelle, il fut surnommépar ses coéquipiers « Jesse » en référence au sprinter américain Jesse Owens, quadruple vainqueur aux JO de Berlin de 1936 du 100 m, du 200 m, du relais 4×100 m et du saut en longueur.
Sa carrière rugbystique s’annonçait brillante, il fut retenu à plusieurs reprises dans la sélection du Languedoc-Roussillon qui, à cette époque, dominait le rugby français, mais les années de guerre ne purent lui permettre d’exprimertotalement son talent.
Le Stade Piscénois se trouvant relégué en divisions inférieures au début des années cinquante, il continua à jouer en équipe première à plus de 35 ans en compagnie de Louis Vacassy, Georges Fraissinet,Auguste Courren et André Combes, afin de transmettre à la jeune génération d’après-guerre sa passion et ses compétences.
Il fut par la suite un éducateur apprécié et reconnu des jeunes du club à partir de 1956 et jusqu’en 1968.
Au début des années soixante, il prit en mains successivement les équipes de minimes, cadets et juniors auxquelles nous appartenions avec son fils Claude, et nous pouvons témoigner qu’il n’avait pas son pareil pour motiver un groupe de jeunes gens, pas plus doués que d’autres, mais unis par l’amour du maillot violet et blanc et il était hors de question pour nous de ne pas sortir la tête haute de stades tels que Cassayet à Narbonne ou Sauclières à Béziers, stades sur lesquels ses exploits restent légendaires.
Cet homme passionné de rugby jusqu’à l’excès, parfois rouge de colère pour un plaquage raté ou une passe manquée, n’avait, après le match, que des paroles paternelles envers ceux qu’il considérait comme ses « petits ».
On dit d’un entraîneur qu’il doit être entraînant, Jesse savait mieux que personne nous transmettre ses valeurs de solidarité, d’abnégation, de respect du coéquipier, d’humilité dans la victoire comme dans la défaite, afin de tirer le maximum de son équipe.
Résistant de la première heure pendant l’occupation allemande, communiste militant, il avait de ces années noires conservé un esprit de camaraderie dans le combat et de refus de l’abdication qu’il nous a communiqués avec passion et qui, jeunes adolescents, nous a aidé à grandir.
Il restera pour nous tous un exemple de vie.
Raoul Saurou et Jean-Luc Clerc

Eric BAUDOU Panoramix ou le San « Blaze »
« Silhouette élancée, catogan argenté hâtivement domestiqué, réflex numérique en bandoulière ou lui cachant le bout du nez, peut-être l’avez-vous remarqué, lors des festivités passées se préparant à photographier ?
Peut-être même, à son accent pointu avez-vous décidé qu’il était parisien ? Vous ne vous seriez guère trompés.
Hormis quelques épisodes à l’étranger, en effet il l’a été jusqu’à sa retraite avant de venir habiter, après l’avoir restaurée, la maison de son grand-père dans laquelle, enfant puis adolescent, il se rendait chaque été. Il en garde d’ailleurs le souvenir un peu flou d’un grand jardin lumineux mais solitaire et de mornes vacances sans théâtre ni concert ../.. Reine Serrano »
article paru in extenso dans le BUlletin L’AMI DE PEZENA S97 2021 JUIN P22
ADP97-2021-06p22 Panoramix ou le San « Blaze » Eric Baudou photographe par Reine Serrano
Atelier chez embroderie chez Eve- Marie BOINAY

ADP Bulletin 71 décembre 2014 p23 Eve-Marie Boinay par Nicole Cordesse
Marie-Pierre BONNIOL
ou la technique de l’émail peint
L’Art du Feu- Emaux sur cuivre. 16, rue Mercière Bonniol. mariepierre@hotmail.fr
Elle est l’une des plus anciennes artisanes d’art, en place depuis 1985. Quand elle sort de son atelier, 16 rue Mercière, elle a vue sur la Maison des métiers d’arts. Elle y expose d’ailleurs quelquefois. Elle s’est formée auprès de Boris Veisbrot, maitre émailleur à Limoges. Sa technique, placer de l’émail sur du cuivre et ensuite y poser un décor.
Voilà le travail de Marie-Pierre. Qui demande trois cuissons successives, la première applique la pâte émaillée, la deuxième fixe le dessin, et enfin la troisième en parfait la coloration.
Ce travail, réalisé sur de petits formats, nécessite une grande rigueur. Dans ce savoir-faire intervient évidemment la création artistique, l’important étant le décor et c’est le décor qui fait l’originalité de l’oeuvre. L’artisane ne manque ni de sources ni d’imagination. Elle accommode à sa façon…
A sa façon, elle invite les mythes, la littérature, les arts, l’architecture : si la Commedia del Arte lui suggère un Arlequin bondissant, elle aime la préciosité des siècles passés avec leurs élégantes et leurs dévots.

Les Sganarelle ou Tartuffe de Molière, le joyeux bestiaire de La Fontaine, les scènes de Jacques Callot, de Lewis Carroll, tout un monde multiple, accroché aux murs, entoure sur sa table de travail, la dernière création en cours. Le tracé à la plume est poétique, humoristique, satirique. La finesse du trait et la sensibilité de Marie Pierre font sa réussite. Appréciée par les touristes qui emportent un souvenir de leur passage. Bien connue des Piscénois qui lui demandent une création personnalisée pour marquer artistiquement des naissances, des anniversaires, des fêtes de Noël.
(extrait de l’article de Nicole Cordesse paru au bulletin décembre 2017 – voir article in extenso ci-dessous)
ADP Bulletin 83 décembre 2017 p 20 Marie-Pierre Bonniol par Nicole Cordesse
PHILIPPE BOT, (1941-2024),
Grand Prix National des Métiers d’Arts , Meilleur Ouvrier de France (MOF)
– IN MEMORIAM PHILIPPE BOT par Nicole Cordesse
article paru dans le Bulletin des AMIS DE PEZENAS ADP108-2024-03P25-26
Philippe Bot l’ami des métiers d’art nous a quittés
Il était né en 1941, il est décédé le 4 février 2024, à l’âge de 82 ans. En la personne de Philippe Bot, Les Amis de Pézenas, La confrérie du petit pâté de Pézenas, La Mirondela dels Arts ont perdu un grand ami. Un ami de la ville, un ami de la culture, un ami de l’artisanat d’Art. Jusqu’à ces derniers temps, malgré la santé qui lui jouait de temps en temps quelques tours, Philippe était de toutes les manifestations, souriant, chaleureux, enthousiaste. Il n’était jamais avare de réactions enjouées, d’exclamations admiratives, qu’il colorait malicieusement de boutades en patois. Tourbain mais viscéralement piscénois, il aimait Sa ville. Philippe Bot avait succédé à son père et repris en 1975 la bijouterie familiale créée par son grand-père, à l’angle de la Rue Saint Jean et de la Rue des orfèvres. Il se fit très vite un prénom, et dès 1979, il reçut le titre prestigieux de « Meilleur Ouvrier de France », un titre venu couronner son chef-d’oeuvre de créateur : Un bijou inspiré du Labyrinthe de la Cathédrale de Chartres. Dès 1984, à la suite de Gabriel Lanet, Philippe
avait pris la présidence de la Mirondela dels Arts, qu’il garda jusqu’en 1987. Par son entregent, il avait établi des liens privilégiés avec les artistes qu’il accueillait parfois chez lui. Il aimait rappeler ses rencontres avec Jean Vilar le créateur du Festival d’Avignon, avec Jean Le Poulain, Ivry Gitlis, ses joyeuses soirées et ses fous rires avec Michel Galabru. Il avait écrit un grand livre de souvenirs, il hésitait à le publier. « Il est trop gros, m’avait-il dit, il faut que j’allège ! » Tant de souvenirs étaient pour lui difficilement « allégeables » ! En 1992, ce « Mof », « Languedoc, la clé des coeurs » chez les Compagnons du Tour de France fut décoré dans l’Ordre National du Mérite pour son bénévolat au sein de la Société des Meilleurs Ouvriers de France. Il y intervenait, en homme de l’art, dans les jurys nationaux de la bijouterie et de la joaillerie, il voyageait dans toutes les villes de France, il était reçu à Paris, à l’Elysée, à la Sorbonne. Autres marques de reconnaissance de son talent et de son dynamisme, il fut chevalier des Palmes académiques et, en 1997 le voilà décoré chevalier de la Légion d’Honneur. L’artisanat d’art fut son domaine d’excellence. On n’oubliera pas son engagement pour la promotion des Métiers d’Art. Donner ses lettres de noblesse à l’artisanat et en faire reconnaitre la valeur créative furent le grand combat de sa vie. Le Grand Prix National des Métiers d’Art en 1988, avait
récompensé sa persévérance. La naissance de La Maison des Métiers d’art en 1992 la couronna : Pézenas se réveilla un matin « Ville de Métiers d’art ». Au rez-de-chaussée de la Maison Consulaire, sur la Place Gambetta, La Maison des Métiers d’Art est une référence touristique qui rythme par ses expositions la vie culturelle piscénoise et accueille en toutes saisons un public nombreux.
Depuis 50 ans membre du Conseil d’administration des Amis de Pézenas, Philippe défilait encore en 2023 le jeudi de l’Ascension avec la Confrérie du Petit pâté. Dans le cortège qui allait du musée au théâtre, nous cheminions côte à côte. Il saluait, il commentait, il m’expliquait l’histoire des anciens piscénois dont nous longions les habitations ou les commerces. Sa mémoire, mémoire des lieux, mémoire des visages, mémoire des évènements, recréait avec délice, le Pézenas d’avant, qu’il avait connu et vécu. Une mémoire piscénoise s’en est allée avec cette personnalité brillante qui a cru à l’intelligence, à la sensibilité, à l’inventivité de la création manuelle, et qui a porté haut l’image de sa ville.
Nicole Cordesse
– Vendredi 16 mai 2025
Hommage à Philippe BOT à la Maison des Métiers d’Art de Pézenas, dont il a été le fondateur
Une plaque a été apposée sur le mur de la salle qui porte maitenant son nom

Christophe et Jean-Philippe Bot dévoilent la plaque

article MIDI LIBRE BEZIERS 21 MAI 2025
Jean-Marie Boudet
Confiseur de « bonbon qui ontle goût de leur odeur «

Petit, qui n’ jamais salivé bruyamment devant un bocal débordant de « bonbecs » colorés, carambars, roudoudous, Chupa chups, skittles ou tagadas ? Qui n’a jamais rêvé de devenir Charlie explorant la chocolaterie ? C’ est en partie l’expérience qu’on peut faire si on a gardé l’innocence et les folles envies de l’enfance en se rendant, par le chemin de Saint-Christol, dans la pittoresque fabrique artisanale de berlingots de Pézenas où, ce jour-là, nous attendait, carrure de rugbyman et langue bien pendue, Jean-Marie Boudet, gérant et maillon fort désormais de la célèbre entreprise familiale dont il avait accepté de nous parler…./…
article in extenso ADP -111-décembre 2024 p 21 article de Reine Serrano
Annie BOULIS Sur le chemin d’Annie Boullis
N’ayant jamais courtisé les trompettes de la renommée, elle s’étonne qu’on veuille faire son portrait, rechigne un peu à l’idée mais finit par accepter. Il faut dire que, baroulaïres médusées, nous avions grimpé côte à côte le Caroux sous l’oeil stupéfié des mouflons et que cela scelle l’amitié ! Annie Fadat ! Un nom connu à Montpeyroux où elle est née dans une famille de vignerons aux vins désormais réputés et où d’aucuns furent assureurs, fabricants de « verdet » et même coiffeurs comme son père Léopold. Des vies rugueuses malgré les promesses du pampre précieux mais dont Annie s’éloigna en partant étudier à la fac des sciences de Montpellier avant de réaliser qu’elle en pinçait pour la géographie. Ce bafouillage universitaire la conduisit directement à l’enseignement et jusqu’aux zones humides de Moselle d’où elle revint précipitamment avec la certitude que fille de Ré elle était et resterait.
Commence alors son parcours d’institutrice au soleil avec Lodève et son Sacré-Coeur argenté, Roqueredonde dont l’intérêt éveillé la rassure sur ce premier poste proposé par l’Education Nationale, Alignan-du-Vent et sa maternelle enchantée, Pézenas et son école primaire acidulée mais motivée, et dans laquelle
viendront s’achever, avec un brin de nostalgie, ses trente-trois ans de carrière. Cependant, femme d’action à l’inénarrable générosité, Annie est prête à s’embarquer pour un nouvel engagement et intègre le cercle des bénévoles de l’action sociale de la Croix Rouge de Pézenas dont elle sera élue présidente quelques années plus tard. …/…
…/…Aujourd’hui, après huit ans de services passés à la tête de La Croix Rouge, l’heure est venue pour Annie d’abandonner la voie tracée car en 2021, elle ne se présentera pas pour un troisième mandat ; mais personne n’a encore osé se présenter sans doute impressionné par sa rayonnante personnalité. (extrait de l’article de Reine Serrano paru au bulletin juin 2020 – voir article in extenso ci-dessous)
ADP Bulletin 93 Juin 2020 p22 Sur le chemin d’Annie Boullis par Reine Serrano
Cédric BRANCHU , ferronnier d’art
Cédric Branchu est modeste. Sourire, douceur, réponses lapidaires… sur son travail du fer. Il a été formé par une figure piscénoise, l’inoubliable Lucien Marnet. Son diplôme de ferronnerie en poche, après quelques années passées auprès du maître des forges de l’époque, Cédric reprendra l’atelier et forgera tout seul dès 2008. Il m’explique qu’il ne faut pas confondre ferronnerie et métallerie. L’artisan ferronnier travaille à chaud, devant le feu, à la forge. Il a son rythme, il a la lenteur de celui qui sollicite la matière, la tord, la fait plier. Le ferronnier d’art exerce dans la création, dans la décoration, dans l’ornement. Il fait du «’sur mesure’». ../.. Nicole Cordesse
Article paru in extenso dans le Bulletin L’AMI DE PEZENAS 98 2021 SEPT P22
Philippe CHARLEUX ou la voie du conte
Novembre flamboyait.
Dans la salle des tapisseries du musée Vulliod-Saint-Germain on fêtait, en douceur et gaieté, la fin de l’exposition sur « les arts de la table » : Philippe Charleux, perché sur un tabouret, nous emportait de sa voix juste et ronde au pays de Daudet, de Garrigou et de Dom Balaguère ; et chacun des’allécher d’images piquantes, de vins gouleyants, de rôties et de carpes dorées.
Un retour malicieux et sans artifice au péché de gourmandise ; un ravissement teinté d’innocence et qui nous assurait que le conte n’avait rien d’obsolète à l’ère des écrans et d’internet mais qu’il était, à jamais, arrimé à l’humanité ; d’ailleurs, dans les écoles appropriées, le succès croissant de l’apprentissage au métier de conteur le prouvait. Pourtant, venant de notre invité, un tel choix intriguait : pourquoi ce licencié en droit était-il entré dans la carrière artistique puis avait décidé, en 2004, de se consacrer tout entier à l’art modeste mais généreux de conter ?
Un retour nostalgique à Homère et aux rapsodes de l’Odyssée ?
Un souvenir bourguignon d’anciennes veillées autour des cheminées ?
Un sens inné du phrasé et de l’éloquence ?
Non ! Simplement, à vingt ans, il avait pris conscience de ses goûts et de ses préférences. Il aimait la rigueur, le théâtre et la danse contemporaine, il se plia à leurs exigences avant de cofonder le Théâtrio-danse qui, à Pézenas où il s’était installé en 1979, allait faire sa renommée. Le modelage restait le mot qu’il préférait car, si le talent et la matière première lui avaient été donnés, il se devait de les affiner avant de les partager…/… (extrait de l’article de Reine Serrano paru au bulletin mars 2018 – voir article in extenso ci-dessous)
ADP Bulletin 84 Mars2018 p20 Philippe Charleux par Reine Serrano
Philippe Charleux (1979 – 2022)
article paru in extenso dans le Bulletin ADP 106 Septembre 2023 p11-15
Un récit tricoté, par lui-même, curieux de redécouvrir son aventure en terres piscénoises… Une lecture « promenade » du passé à la lumière d’aujourd’hui. Cela pourrait commencer par… Il était une fois, « un gars » de 29 ans. Venant de la région parisienne, il s’installe à Pézenas en juin 1979, avec son épouse, Hélène L. Formés à la danse contemporaine, ils ouvrent un lieu, La Cour des Arts, 45 rue Denfert-Rochereau. Leurs objectifs : enseigner l’art du mouvement, et poursuivre de façon autonome, leur travail de création au sein de leur compagnie : le Theatrio- Danse.
Pourquoi Pézenas… l’inconnue ?
« va où tu n’es rien, va où tu ne sais rien… » chante Moustaki. Lumière et douceur du Sud, y sont aussi pour quelque chose.
Ce «gars-là», il a dans ses bagages la pratique de la danse dans laquelle il s’est lancé avec enthousiasme alors qu’il était étudiant en droit à Paris. Les percussions, le rythme corporel, l’improvisation sont ses autres centres d’intérêts. Il aime créer, transmettre, s’aventurer dans le « sensible ». Cette installation, est une véritable prise de risques, qu’il ne mesure pas ! L’inconscience a toutes les audaces ! Ses parents l’accompagnent dans ce projet. Ils ne doutent pas.
Sur place, ils mettent la main à la pâte avant l’ouverture au public… Grande est sa gratitude à leur égard. Une fois installé, lui, « l’étranger », se pétrit, en se confrontant très vite aux difficultés liées à toute activité indépendante naissante dans un environnement inconnu. Des opportunités artistiques heureusement se présentent. Il s’en saisit. Il réussit, mais aussi il rate, chute, se relève, apprend, continue son chemin, avec foi. Un élan intérieur l’anime. Il lui faut trouver le Nord… son Nord ! Dans le couple d’artistes les fissures déjà existantes, se creusent, s’approfondissent… inéluctables elles conduiront à une séparation définitive onze années plus tard, après bien des aventures formatrices.
…/…
Marche aujourd’hui, marche demain,tant que tu marches tu fais du chemin !
1996, fait date à Pézenas ! Le Centre Ressources Molière, s’installe au 1er étage de la Boutique du Barbier Gély. à s a tête, Pierre P. enseignant passionné de théâtre, convaincu de l’essentialité de la pratique artistique à l’école. Une relation de confiance se crée et « le gars » de quarante-six ans, d’exprimer au sein des « classes Patrimoine » son talent de pédagogue et de créateur en prise avec des projets artistiques qu’il accompagne. Une aventure de vingt-trois ans commence avec la danse, puis, le moment venu, avec le conte !
Ces interventions en milieu scolaire, avec des enseignants motivés reliant leurs projets artistiques avec les disciplines scolaires, avec des élèves s’appropriant la danse avec plaisir, intensité et créativité, ne sont pas des actions mineures. « Le gars » peaufine son approche du mouvement, adapte, enrichit son vocabulaire, son sens de la relation, invite chacun « à la présence » toutes antennes dehors. Il précise, en conscience certains enjeux de la condition humaine : réagir à la pesanteur, se relier par les sens, apprendre, collaborer, échanger, créer des liens… Chaque expérience soulève des questions, provoque la
nécessité de creuser un peu plus !
« Ce sont avant tout, les interrogations qui mettent la vie en mouvement » (Jon Kalman Stefansson).
D
es rencontres se font…. Avec Thierry R. danseur, chorégraphe il partage au sein du CRM, des moments festifs… Danser, Parler d’Amour sur la plac e Gambetta. Mais au ssi, par effet de résonance, avec Robinson, chanteur-compositeur pour les petites oreilles qu’il accompagne lors de créations musi ales chorégraphiées avec des écoles du Cap-d’Agde, de Sète, de Berre l’Étang.
Sans oublier, Marc H. auteur compositeur interprète talentueux, qui se révèlera un complice de scène de grande qualité, lorsque viendra pour « le gars » le temps de créer son premier spectacle de contes Dans le Souffle des Vents en juillet 2009
…/…
S’aventurer…avec Pézenas, “la rayonnante“!
En 1993, Marc P. propose « au gars » de se lancer sur un autre « terrain de jeu » : les visites théâtralisées estivales de l’Office de Tourisme. En compagnie du guide Jean-Louis D. il se découvre un talent et du goût pour cette forme théâtrale, en contact direct avec le public. Plus tard, en 2007, à l’initiative de « Bloc-Notes- Productions », il rencontre l’auteur et metteur en scène Philippe V. Le Groupe des Ôparleurs se crée, et au fil de quinze années ininterrompues revisite, en compagnie de Gaëlle L. comédienne, l’histoire d’Agde, de Pézenas, de Narbonne et de Carcassonne. Une foule de personnages pittoresques à incarner, de petites histoires à vivre pour raconter la grande dans un souffle léger, joyeux et inventif !
Tourner la page…
En 1995, à 45 ans, il devient intermittent du spectacle. Plus que jamais l’image de l’artiste funambule, avançant dans un équilibre précaire sur son fil est d’actualité !
En 2002, au Théâtre de Verdure, l’aventure de la Danse, mais pas celle du corps – siège de notre présence au monde – se termine avec la Cie Danse Muse de Kirsten D. Il interprète en solo, « CEL » : enfermé entre quatre murs, un homme trouve avec énergie sa voie libératrice ! Clin d’oeil du « destin » ? Si le spectacle vivant occupe plus de place dans ses activités, pour autant, il continue à transmettre. C’est dans ses gènes ! Il le fait avec cette conviction que la relation entre enseignant et enseigné, se doit d’être fondamentalement une relation d’échanges.
Chacun apprenant de l’autre et le nourrissant de sa présence attentive, impliquée et riche de singularités. à partir de 2003, au Centre des Arts du Cirque Balthazar, à Montpellier, il initie au jeu d’acteur et aux percussions corporelles de jeunes circassiens en formation professionnelle et participe avec un intérêt sans cesse renouvelé à la création des spectacles de l’école, comme « assistant metteur
en piste » aux côtés de Martine L. « Cette vie n’en est pas une si nous empruntons toujours la même route… »(Jon Kalman Stefansson)
Puisqu’il est question de tourner la page, direction la librairie Le Haut Quartier – les livres, objets de
LUMIERE et de SOUFFLE l’ont toujours attiré. En 2008, « Le gars » y rencontre Laurence C. professeure, conteuse et conjointe du libraire. Dans ce lieu, il n’en est pas à sa première aventure. Avec les propriétaires précédents, il en a vécu d’autres : avec Edmond C., Marie-Cécile V. et Méditerranée Vivante, avec Manu K. et Dissipation des Brumes Matinales, la Maman des Poissons, le Festival Desmots’Gnac, et avec Elisabeth R. viticultrice. C’est là, rue Conti, qu’il crée son premier spectacle de lecture à voix haute :
« Paroles à boire ». Il y parle de Vin. « Le gars » est né en Bourgogne et il vit dans le Languedoc…
Alors ! Avec Laurence C. fondatrice de Deux Mains des Mots, l’aventure sera toute autre : à ses côtés il poursuit son chemin dans l’art du conte, commencé en 2004 par une formation au Centre deLittérature Orale à Vendôme. Avec Laurence, naissent « Le Cabaret du Conte », « La Circulade du Conte », les ateliers réguliers de formation pour les adultes, et les ateliers « Enfants conteurs » proposés entre-autre par le CRM, dans les collèges et les écoles primaires de 2009 à 2019.
« Le coeur trouve son matin dans la rosée des petites choses, et s’en trouve rafraîchi. » (Khalil Gibran)
…/…
2022, avec Jean-Baptiste, Jean-François, Boby et les autres…
Revenons en 2013… Philippe V. inspiré par l’air moliéresque piscénois, écrit et met en scène, pour « le gars » de 63 ans, une pièce en 4 tableaux JB2 une vie de Molière. Au Festival Molière de juin 2013, Frédéric G. directeur du service Culture programme quatre représentations.
Le public est enthousiaste. En suivront une douzaine d’autres. Pour les 400 ans de la naissance de Molière, neuf ans plus tard, la pièce est reprise. Le défi est aussi lancé, toujours avec Frédéric G. de créer en juin, une déambulation théâtrale, en solo. Le Bourgeois Imaginaire rend un hommage humoristique et populaire aux artistes dont les empreintes sur le cours Jean-Jaurès constituent les incontournables « Pas de Molière » initiés par André G.
Mais en 2022, la ville est en ébullition ! L’occasion est trop belle ! Et « le gars » de faire entendre en mars, les poèmes de Jean-François Sarasin lors de la conférence de Sarah P. au Théâtre, puis en juin, de balader des contes dans le centre historique avec les conteuses de « 2 Mains des Mots », de lire à voix haute avec les participants de l’atelier du réseau des médiathèques, et enfin, en septembre, d’animer à l’Hôtel d’Alfonce, lors des journées de reconstitution historique, « Contes sous le figuier » et « Salons littéraires en plein air » en partenariat avec la Maison Aubert, qui depuis 2019 « fait pétiller » à nouveau sa limonade à Pézenas.
Après tout cela, comment ne pas s’accorder à dire, avec « le gars », que « la vie n’est pas un long fleuve tranquille »… Comment ne pas s’interroger sur ce constat : à quoi tiennent les choses ? Et « le gars » de remercier tous ceux, ici et là, qu’il a rencontrés sur le chemin. Et pour conclure, ces quelques mots adaptés d’une chanson de Léo Ferré :
« Je me suis embarqué sur l’étang de mes souvenirs, et j’ai fait avec un plaisir étonné le voyage curieux de ma vie d’homme à Pézenas. Mes mauvais souvenirs se sont noyés dans l’étang, et je n’ai gardé que cette blanche brume, flottante et mouvante… animée par mon souffle et mon coeur d’enfant. »
Philippe Charleux
L’oeuvre au rouge d’Elke DAEMMRICH – Atelier : 2, rue de la Rotonde 34290 Alignan-du-Vent
04 30 72 35 14 – adressemail : elkedaemmrich@aol.com; site : www.elkedaemmrich.com.
Inutile de lui poser la question, son oeuvre flamboyant d’évidence : Elke
Daemmrich ne croit pas à la mort de l’art qu’on nous prédit depuis des décennies. Pourquoi en serait-il autrement ? Sa foi en son talent d’artiste confine au sacerdoce, à la liaison fatale et à la maternité absolue et triomphale ; quant à ses peintures et à ses gravures souvent taguées des voluptés de la méditerranée, elles ont vite intéressé les galeries, les musées et de riches fondations. Rien d’étonnant à cela ! Son style sans mièvrerie, touffu et tout flammes mais au scalpel d’entomologiste, a de quoi exciter un oeil morne.
C’est, en effet, par des couleurs violemment saturées, des rouges claquant
https://moliere-pezenas.com/wp-content/uploads/2024/02/adp83-2017-12-p19daemmrich-elke.pdfcomme des oriflammes, des bleus qui sont des lames et les verts des acides
mordants qu’elle embrase nos langueurs ; c’est par des métissages de dessins et d’idées sophistiqués, des jeux de transparence et de reflets qu’elle incendie notre imaginaire ; c’est par des motifs savamment tissés débordant la toile ou le papier qu’elle gloutonne nos timidités. Que voulez-vous ? Elke Daemmrich n’a aucun goût pour la sobriété et le minimalisme, car à l’ascétisme, au vide et au presque rien, elle préfère l’abondance et le plein. Mais il ne faudrait pas se leurrer ! Si certaines de ses visions magnifient encore l’opulence, résonnent d’hymnes à la vie et aux délices ou palpitent d’humour comme une coquetterie dans l’oeil, elles ne renvoient plus à l’image de l’Eden perdu qu’elle avait entrevue. De subtils changements, prémices d’une sinistre métamorphose, sont venus corrompre l’atmosphère de liesse et de gaîté des premières créations : la profusion d’objets s’est faite étouffante; les aiguillons, les dards, les rostres des insectes plus agressifs ; les corridas plus sanglantes … Puis déferlèrent les guerres, la catastrophe de Fukushima, les attentats, et l’impérieuse nécessité de lutter contre ces sortes de société polluant la paix et tous nos rêves de ciel, de mer et de terre purs. Dès lors sans renier la couleur et la saveur de l’existence, Elke Daemmrich s’est mise à signer à l’acide son engagement et à déverser crûment dans ses eaux fortes principalement, ses lugubres séries d’oiseaux démembrés, de villes dévastées, d’humains sidérés, égarés, contaminés.C’est ainsi que l’artiste allemande, s’adonnant à la danse de l’Apocalypse et de la mort, est entrée, à son tour, en résistance.
(extrait de l’article de Reine Serrano paru au bulletin de décembre 2017 – voir article in extenso ci-dessous)
ADP Bulletin 83 décembre 2017 p 19 Elke Daemmrich par Reine Serrano
Olivier DAHLMANN , doreur à la feuille traditionnelle
«’ Tout ce qui brille’ », assure avec un brin d’humour, l’enseigne de l’atelier de dorure située place Gambetta à quelques mètres de la Maison des métiers d’art’ ;
mais ne vous inquiétez pas, l’adage connu s’arrête là car, pour Olivier Dahlmann et Kati Lorand son associée, le métal précieux reste un principe et le respect de l’objet à restaurer, une fin ; entre les deux, un long et délicat travail bien codé au cours duquel l’élément en bois, plâtre ou métal à red or e r doit être méticuleusement poncé, dégraissé, maintes fois apprêté et lis sé avant d’être enrubanné de frémissantes feuilles d’or ou d’argent. Ici, les gestes se font précis et aériens pour que renaisse l’histoire des christs et des encensoirs, des madones et des bougeoirs, des lustres et des miroirs../.. »
article in extenso paru dans le Bulletin L’AMI DE PEZENAS 98 SEPTEMBRE 2021 P11
ADP98-2021-09p11 La riche palette d’Olivier Dahmann par Reine Serrano
Jean-Charles DOMENS ou l’aria d’un éditeur
La rencontre eut lieu selon le bon usage du who’s who‘s piscénois, aux éditions Domens , 22 rue Victor Hugo.
Une porte qui résiste en tressaillant, un parfum oublié d’encre et de papier, un jardin de livres, de dessins et d’affiches fleurissant sur des étagères, et nous voici soudain revenus au temps, peut-être à jamais perdu, des pages pieusement feuilletées et des Lettres sublimées. C’est dans ce lieu même, sachant lustrer l’or vif de la mémoire, que Jean-Charles Domens, éditeur, reçoit une fois par mois, le vendredi, ses auteurs, ses lecteurs et les amis de Pézenas ou d’ailleurs.
Un clin d’oeil subliminaire aux salons littéraires d’antan de la marquise de Lambert ou de Madame du Deffand ; une échappée belle autour d’un verre, mais sans affèterie, dans la poésie et la littérature d’aujourd’hui. Je le vois arriver du fond de l’atelier, la démarche souple presque féline, l’air un brin austère mais le regard pétillant. La poignée de main est ferme, le discours volontaire, la confidence mesurée mais laissant deviner qu’il aurait pu être médecin ou, pourquoi pas, sherpa si son goût pour les sciences et la varape l’avait rattrapé. Il se retrouva donc libraire, poursuivant sagement la saga des « Domens, imprimeurs ou libraires depuis 1880 », à l’exemple de son père, Henri, courtisant toute sa vie les,coulisses de l’esprit et du théâtre et qui lui apprit la typographie, les pleins et déliés des caractères, le style perlé et policé des nuanciers ;
pourtant Jean- Charles ne fut jamais imprimeur abandonnant à son collaborateur le privilège de ce subtil savoir-faire. Huit ans après on le retrouve, ancré dans sa librairie et concoctant avec des amis (dont Paul Reynoird, Jacques Mathieu et Huguette Lapointe), à l’esprit aussi frondeur que lui, une revue satirique, Le Pavé, bardée d’illustrations et d’humour et qui allait cancaner pendant deux années au-dessus de la mêlée, combattre à fleurets mouchetés les vices cachés de la société et de quelques personnalités. Une tradition insolente et hardie des Domens et de leur imprimerie qui publièrent, jusqu’en 1972, Le Socialiste, journal d’opinion devenu, au cours du temps, Pézenas-hebdo.
Par bonheur, le naufrage du Pavé ne plonge pas Jean-Charles dans l’obscure « mer de la tranquillité » mais réactive son clair désir d’éditer ; et le destin bientôt s’en mêle : Huguette Long- Lapointe, lâchée par son éditeur parisien, propose à notre libraire, qui toute sa vie s’est ébaudi des chansons de Boby et les connaît par coeur, l’édition de la biographie de son frère.
Soutenu par les conseils chaleureux du fameux Edmond Charlot,Jean-Charles Domens accepte. Et le coup d’essai devient un coup de maître : la biographie de Boby Lapointe, qui atteint les cinq mille exemplaires, suscite l’enthousiasme des medias régionaux et l’intérêt des journaux nationaux vantant le contenu…/… (extrait de l’article de Reine Serrano paru au bulletin mars 2019 voir ci dessous article in extenso)
ADP Bulletin 88 mars 2019 p20-21 Jean-Charles Domens ou l’aria d’un éditeur par Reine Serrano
L‘art outsider ou insolite de Kebir EDDOUBICH
paru dans ADP Bulletin 70 septembre 2014 p23
Emmanuel FLIPO L’art comme réflexion
ll est libre, Emmanuel. Pas de réseau. Pas d’inféodation.
Un créateur toujours en recherche personnelle, toujours en devenir. Les thèmes, les techniques, les supports, lesmatières, il les aborde en explorateur, il ouvre des voies. Cette impatience, cette effervescence lui vont si bienV!
Emmanuel me rappelle le passé, sa formation, ses études artistiques à Toulouse et à Nice, il consent des maitres, Beuys, Mondrian, Bouguereau.
Des influences acquises au cours de ses dix années newyorkaises et lors de ses nombreux voyages.
Il aime l’Italie, le pays d’origine de sa famille, dont il s’inspire souvent, il évoque le land art qui lui a valu des performances à Nîmes, Bordeaux, Toulouse, Copenhague (COP 15)…
Des expériences libératrices, un vécu qui a fait grandir le «VgaminV» – c’est ainsi qu’il se définit – et il ne se trouve pas si éloigné du jeune artiste et jeune père, ouvrant, à 28 ans, son atelier dans la boutique maternelle, rue de la Foire.
Dans son atelier, Rue des Orfèvres, il y a abondance : polychromie et monochromie,collages, juxtapositions, compositions architecturales, cartographies imaginaires, majestueux formats, feuillets expérimentaux. Un savant mélange, une richesse qui attire et qui séduit. Flipo a deux sources essentielles d’inspiration, les personnages et l’architecture, qu’il interprète dans une ambivalence figuration-abstraction. La réalité alors devient autre. Quand l’oeuvre se disperse en déchirures, s’évade en matière érodée et fragile, elle atteint l’intemporel et l’universel. Ainsi l’évanescence des madones, ainsi les turbulences guerrières. Ainsi les visages entre ombre et lumière, les nus féminins anonymes et lointains. Ainsi les décors de théâtre et d’opéra où les traits d’un pinceau soulignent et affinent, où les flashs estompent et colorisent, où l’orthodoxie classique d’oeuvres architecturales est délicatement revisitée. …/… (extrait de l’article de Nicole Cordesse paru au bulletin décembre 2019 – voir article in extenso ci-dessous)
ADP Bulletin 79-décembre 2016-p29 Emmanuel Flipo par NIcole Cordesse
Frédéric GOURDON émotion et partage
Arrivé à Pézenas en octobre 2010, le « nouveau » directeur du service culturel inscrit peu à peu sa marque personnelle dans l’aventure collective de la culture et s’impose en douceur dans le paysage piscénois…
« l’important c’est le lien social, c’est prendre en compte toutes les composantes de la société….une mise en vie de la ville, du mieux possible, pour tout le monde »
in extenso Article de Nicole Cordesse dans L’Ami de Pézenas décembre 2012 N°63 p17
André GOUROU
ou la pharmacopée engagée
par Reine Serrano
article paru in extenso dans le Bulletin ADP 103 Décembre 2022 p 26
Qu’on se rassure ! Il n’a rien de Homais, le pharmacien reptilien que l’on peut rencontrer dans le roman de Madame Bovary ; il a plutôt l’air d’un poète, ou d’un gourou peut être, avec sa nouvelle barbe non taillée de jeune retraité mais que la mélancolie a déjà rattrapé.
Il l’avoue d’ailleurs avec simplicité : oui, son officine de Pézenas et le poste de professeur de Pharmacie expérimentale qu’il avait lui-même créé à l’Université de Montpellier, lui manquaient. Une nostalgie qui affleurait déjà, en juin dernier, sous le discours et la mise en scène raffinés de ses adieux et que ses étudiants, d’un seul élan, avaient affectueusement ovationné. Sans doute, ceux-ci le remerciaient-ils aussi de les avoir initiés, sans jamais défaillir, aux trois principes magiques d’une bonne pharmaceutique, « l’empathie, l’écoute, le conseil ».
Pourtant, aucune « vocation première » ne poussa André Gourou à devenir pharmacien si ce n’est un penchant pour la botanique éclos sans doute parmi les plantes et les roses de la boutique de ses parents fleuristes ; puis la pression sociale fit le reste, les métiers de médecin, notaire et pharmacien ayant longtemps appartenu conventionnellement à la catégorie des métiers les plus honorables.
Mais André Gourou, surnommé Dédé par un grand nombre de piscénois, n’aurait jamais pu exercer son métier de pharmacien d’officine ailleurs qu’à Pézenas, la petite cité occitane s’étant épanouie dans son âme comme une belle-de-jour en un jardin languedocien avant de devenir au fil du temps, aux dires de ce « célibataire sans enfant » tour à tour « son épouse et sa maîtresse ».
Dès lors, pour cette ensorceleuse en habits de noble dame et au talent de comédie, il se mit à rêver de destinée, remit au goût du jour les frasques du Carnaval et la folie des « machades », soutint dans le stade les olas musclées et les maillots violets, et engloutit au nom de sa notoriété les petits pâtés de Lord Clive.
Déplaçant des montagnes, il réussit même, à s’immiscer dans le monde des stars pour la gloire et la renommée de sa dulcinée. C’est ainsi qu’on put le voir dans le métro, des kilos d’argile sur les bras, passer la Seine tel César franchissant le Rubicon, et se caler avec audace, pour prendre leurs empreintes de mains ou de pieds, auprès des vedettes parties en goguette ou des célébrités dans l’impossibilité de se déplacer : avec l’appui de la Mirondela et de Christian Sempéré, il avait toujours rêvé de créer sur les allées longeant le Cours Jean- Jaurès et à quelques mètres de la salle de cinéma exposant le vieux projecteur de son grand-père, un chemin pavé de dalles réservées aux acteurs et portant les traces de leur passage à Pézenas, ce qui bien sûr a depuis été exécuté par François Siffre, le potier.
Vous l’aurez sans doute subodoré : avec l’air du Poulain et de la liberté qui trottent dans sa tête, André Gourou, notre pharmacien, ne voudra jamais se soumettre à une retraite bien méritée. La faculté l’a déjà deviné et vient de le contacter pour un enseignement bénévole.
Reine Serrano
Elena Iourach
entre Exil et Royaume
par Reine Serrano
Il faudrait, non pas une page mais un carnet entier pour dessiner son portrait, esquisser les chemins qui l’ont inspirée, croquer les villes qui l’ont modelée, Zaporojie où elle est née, Saint-Pétersbourg où elle a étudié, Tunis qu’elle a aimée et aujourd’hui Pézenas qu’elle a su apprivoiser : la vie multiple et flamboyante d’Elena Iourach, à la fois musicienne, écrivaine et médecin, semble jaillir d’un roman picaresque singulier.
C’est au café des Arts, et dans un français châtié fleurant bon le cuir de Russie et le musc oriental, qu’elle nous a confié quelques bribes de son histoire avec une liberté de ton surprenante.
De sa jeunesse vécue en URSS dans le milieu privilégié des apparatchiks et de la Nomenklatura auquel son père, architecte et communiste appartenait, elle conserve de joyeux clichés mêlant foulards rouges, lilas bleus et foules en liesse se pressant à l’entrée des concerts.
Cependant au pays du bonheur soviétique, tout n’était pas aussi doré qu’une vatrouchka ou qu’un mazurek. Elena le sait bien, elle dont le père mourut tragiquement à la suite de son exclusion du parti et qui, depuis toujours, rêvait de vie plus libre, moins morne et moins grise. Toujours est-il que, diplôme de médecine et de musique en poche, elle décida de s’embarquer pour les chimères de l’occident et quitta son pays « avec un étranger » après avoir essuyé les foudres humiliantes du KGB auquel, avant de partir,elle fut confrontée.
C’est ainsi qu’on va la retrouver pendant quelques années à Tunis dans le giron de la société politique aupouvoir, mariée puis divorcée et exerçant la médecine tout en dirigeant, en même temps, l’école de piano Rimski-Korsakov qu’elle avait créée.
« Mais tout vacille dans la vie », écrit-elle, avecphilosophie, dans son premier roman. Deux décennies plus tard, elle est à Pézenas, médecinreconverti dans la cuisine mais dont la générositénotoire et culinaire va vite avoir raison de son budget et de sa nouvelle orientation. Par chance, ses talents depianiste et de professeur de musique qu’elle n’a jamais cessé de cultiver vont lui ouvrir les portes de larenommée et du festival de Pézenas Enchantée auquel participent désormais, chaque année, les plus brillantsde ses élèves ; et bien que l’ intransigeance de son enseignement la fasse souvent « passer pour unesorcière aux yeux de ses apprentis pianistes » , dit-elle en s’esclaffant, elle se « sent aujourd’hui très fière » que certains d’entre eux aient accédé à de grandsconservatoires et obtenu des prix de piano réputés.
À l’évidence, Elena Iourach est l’image-type de la femme libre, moderne et épanouie ainsi que de l’artiste comblée. Comment ne le serait-elle pas, d’ailleurs, après ses succès personnels, musicaux ou littéraires et dont le dernier est la publication, à Tunis,de « La saga soviétique », son deuxième roman ?
Pourtant, quand on lui demande à brûle-pourpoint, si elle ressemble à ces « égarées de l’Est » décrites dans
son récit éponyme et édité en 2015, elle tressaille et soudain éclate en sanglots.
L’exil, choisi ou non, est toujours une souffrance.
article paru in extenso dans le Bulletin Les AMIS DE PEZENAS ADP 110 septembre 2024 p28
